7 mai 2001

Sahara occidental - L'Onu s'incline devant Mohamed VI

Les Sahraouis viennent de refuserun projet de l'Onu, directement inspiré des propositionsmarocaines, sur le référendum d'autodéterminationau Sahara occidental. Nous avons interviewé Sadafa Bahia,représentant du Front Polisario en France.
- Le mandat de la Missiondes Nations unies pour le référendum au Sahara occidental(Minurso) devait s'achever fin juin. Pouvez-vous rappeler le processusen cours?
Sadafa Bahia - Depuisla fin 1991, les Nations unies ont établi un plan de paixprévoyant l'organisation d'un référendumd'autodétermination au Sahara occidental. Depuis, ellesessaient d'organiser ce scrutin mais butent à chaque foissur la constitution du corps électoral. Depuis 1997, lesecrétaire général des Nations unies a désignéun envoyé spécial, James Baker, pour trouver unesolution à l'impasse. Jusqu'à présent, iln'a pas réussi. Dans son dernier rapport, il propose unaccord-cadre selon lequel le Maroc conserverait l'essentiel, àsavoir la souveraineté (défense, monnaie, diplomatie,douanes...), tandis que les Sahraouis devraient se contenter dela gestion des questions locales (sociales et culturelles). Surles aspects économiques, des petites miettes seraient accordéespour les Sahraouis, l'essentiel allant au Maroc. Au terme de cinqannées, des élections devraient définir lestatut du territoire, mais selon ce dispositif, il ne pourraitque rester marocain, puisque tous les Marocains qui y sont installéspourraient voter! Comme ils sont plus nombreux que les Sahraouis,l'issue d'une telle consultation est connue d'avance.
Dans le rapport, il est demandé au Conseil de sécuritéde proroger le mandat de la Minurso jusqu'à fin novembre,ce qui a été adopté vendredi dernier. Durantces cinq mois, James Baker est censé explorer toutes lesvoies possibles, essayer d'améliorer l'accord-cadre ourechercher tout autre accord politique.
- L'Onu a donc adoptéle projet marocain?
S. Bahia - Exactement,l'Onu a repris intégralement le projet de "troisièmevoie" du Maroc. Les Américains et les Français,et surtout les Américains qui décident du sort del'humanité par Onu interposée, ont épouséle point de vue marocain. Selon lui le Sahara doit rester marocain,et ils cherchent une formule donnant l'impression qu'il n'y ani gagnant ni perdant.
- Avez-vous notédes changements à l'égard des Sahraouis depuis l'avènementde Mohamed VI?
S. Bahia - Il y a eudes changements dans les questions maroco-marocaines, mais iln'y a aucune évolution à mentionner quant au Saharaoccidental. Au contraire, sur ce sujet le trait principal de MohamedVI, c'est la continuité de l'oeuvre de son père.
- Quelles sont les propositionsdu Front Polisario?
S. Bahia - Le FrontPolisario avait fait plusieurs propositions aux Nations uniespour essayer de débloquer la situation. D'abord, nous souhaitonsque la commission d'identification des Nations unies reprenneson travail et étudie les demandes de recours. Nous voulonsensuite que les Sahraouis électeurs soient rapatriésau Sahara occidental. Enfin nous demandons la libérationde tous les prisonniers de guerre. Nous détenions prèsde 2000 prisonniers, nous en avons libéré 800. LeMaroc détient plusieurs centaines de prisonniers sahraouis.Les disparus civils sont beaucoup plus nombreux, et Amnesty Internationalcompte 500 disparus et prisonniers civils.
Désormais, James Baker va devoir reprendre son bâtonde pèlerin et tenter de réunir, directement ou non,le Maroc et le Front Polisario. Pour notre part, nous voulonsnous en tenir au plan des Nations unies, à un référendumsur l'autodétermination. Mais pour le Maroc un référendumn'est pas applicable, et ils veulent donc trouver un autre accordpolitique.
Propos recueillispar Laure Favières
+Repères
Ancienne colonie espagnole,le Sahara occidental a été annexé par leMaroc en 1975. Depuis cette date, l'Onu recommande un référendumd'autodétermination sous son contrôle, mais son organisationa toujours achoppé sur le recensement du corps électoraldevant participer au scrutin.
Un gouvernement en exil a décrété, en 1976,la République arabe sahraouie démocratique, reconnuepar 72 pays. Il est réfugié à Tindouf, dansle Sud-Ouest algérien.
Les ressources de ce territoire de plus de 250000 km2 sont: lesphosphates, le cuivre, le fer, le pétrole off-shore, l'orge,les ovins, les dromadaires, la pêche.