3 février 2007

FSM Nairobi - L’Afrique au cœur des débats




C’est la première fois qu’autant d’Africains et d’Africaines se retrouvent à un forum social mondial. Une participation cinq à sept fois plus importante qu’aux précédents forums sociaux africains et plus représentative de la diversité des pays d’Afrique.

Il n’y a jamais eu autant d’ateliers mettant l’accent sur la réalité africaine de la globalisation marchande et permettant l’expression de la diversité des opinions. Ainsi, par exemple, la présence des homosexuels et lesbiennes d’Afrique a été visible dès la cérémonie d’ouverture et sous la grande tente où se croisaient diversité de générations et d’origines, dans un continent où la stigmatisation, voire la répression de l’homosexualité sont encore considérées comme normales. Des solidarités se sont établies pour l’abolition des bases militaires étrangères en Afrique. Les militants de Chine ont discuté avec des Africains de la nature des rapports actuels de la Chine avec l’Afrique - néocolonialisme ou solidarité Sud-Sud ? Des associations africaines et françaises ont discuté des rapports néocoloniaux de la France avec l’Afrique. La délégation guinéenne a informé sur la répression criminelle des grévistes qui vient de faire une cinquantaine de morts et une procession de protestation a eu lieu.
Cette présence africaine a cependant souffert du large espace occupé par les Églises chrétiennes relativement à celui occupé par les pôles de radicalité. Mieux pourvues financièrement, elles ont pu prendre en charge la participation massive des Africains aussi bien du Kenya que d’ailleurs. Le comité organisateur a fermé la porte aux associations radicales des bidonvilles, en établissant une discrimination par l’argent avec des frais d’inscription prohibitifs équivalent à un quart d’un Smic local. Une façon d’écarter les « damnés de la terre » du Kenya, indépendants des opulentes ONG. La radicalité a fini par se manifester avec l’action menée par les associations radicales pour le libre accès des pauvres au site du FSM. La présence en grand nombre de stands commerciaux a suscité de vives critiques sur la « marchandisation » du forum social. Une action « restauration gratuite » a été organisée contre un restaurant appartenant au ministre de l’Intérieur kenyan, qui proposait des repas à des prix prohibitifs. L’omniprésence de la multinationale du téléphone mobile Celtel a aussi été dénoncée. People’s Parliament - des militants du bidonville de Kibera - exclu de la préparation du FSM, a organisé un forum alternatif dans un jardin public du centre-ville. La radicalité de la conscience altermondialiste s’est manifestée par ses porte-parole, particulièrement la sereine Wangui Mbatia, une autre image des habitants des bidonvilles.
Jean Nanga

2007-02-02