27 avril 2000

TUNISIE - Ben Ali s'acharne contre le Raid

Décidément, s'il fallait un exemple de l'inféodation de la justice tunisienne au ministère de l'Intérieur, le cas des militants du Raid (Attac-Tunisie), emprisonnés arbitrairement depuis le 8 avril, en serait une bonne illustration. Pour la seconde fois, le juge d'instruction de Grombalia (une petite ville à 40 km de la capitale) a montré jeudi dernier qu'il entendait en aucun cas faire preuve d'indépendance.
Les 30 avocats constitués pour la défense de Fathi Chamkhi et Mohammed Chourabi, les deux militants du Raid, ainsi que d'Iheb Henri, le gérant d'une unité de reprographie chez lequel ils ont été arrêtés, n'ont pu convaincre ce juge de leur fournir les pièces à conviction indispensables pour préparer leurs plaidoiries. Pourtant, il s'agit là d'un des droits élémentaires de la défense. De même, le juge d'instruction s'obstine à refuser d'enregistrer, dans son procès-verbal, les plaintes des inculpés concernant leurs conditions de détention. Les 3 prisonniers sont séparés dans des cellules surpeuplées (près de 100 personnes par cellule), obligés de dormir à même le sol ou de partager leur paillasse. La direction pénitentiaire a interdit à tous les autres prisonniers de leur adresser la parole, sauf au chef de cellule chargé, quant à lui, de les persécuter. Bien entendu, la mise en liberté conditionnelle a été rejetée et les inculpations maintenues (voir Rouge du 20 avril). La large mobilisation à Tunis et à l'étranger n'a pas encore suffit à faire reculer l'arbitraire. C'est le cas également pour le journaliste Taoufik Ben Brik, en grève de la faim depuis le 3 avril pour obtenir son passeport, illégalement confisqué. Son dernier bilan médical, établi ce dimanche, est des plus alarmants.
La réactivation du mouvement de dissidence démocratique inquiète d'autant plus Zine El Abidine Ben Ali que le malaise social s'exprime désormais ouvertement, comme en témoignent depuis plus d'une semaine les manifestations de lycéens aux cris de "Zine tu n'es qu'un menteur; où sont tes promesses au peuple!"
Ali Abdallah