11 mai 2000

TUNISIE - Ben Ali recule

Fathi Chamkhi, président du Raid (Attac-Tunisie), a finalement été libéré, de même que Mohamed Chourabi et Iheb Heni, arrêtés et inculpés en même temps que lui. Cette victoire, obtenue grâce à l'ampleur de la mobilisation en Tunisie et en France, fait suite à une autre victoire: la satisfaction des exigences principales du journaliste Taoufik Ben Brik. On lui a remis un passeport et il est autorisé à voyager en France comme il le souhaitait. Certes, les charges retenues contre les membres du Raid n'ont pas été levées, et Jalel Zoghlami, le frère de Taoufik Ben Brik, reste toujours en prison, mais les concessions importantes montrent la fragilité d'un régime incapable de régner autrement que par le bâton. La montée des mécontentements et le réveil du mouvement démocratique en Tunisie placent Ben Ali dans une situation qu'il ne parvient plus à maîtriser avec les seuls instruments de la répression. Les énormes bourdes qu'il ne cesse d'accumuler depuis quelques mois (les 99,94% de voix à l'élection présidentielle d'octobre 1999, les conditions dans lesquelles Bourguiba a été enterré, les brutalités contre les journalistes étrangers ces dernières semaines) contribuent à le discréditer et suscitent la méfiance de ses plus fidèles soutiens.
La diplomatie française elle-même, soucieuse avant tout de la stabilité en Tunisie, et que n'a jamais embarrassé la prédilection de Ben Ali pour les méthodes policières, paraît comprendre que le principal facteur d'instabilité est désormais Ben Ali lui-même. Chirac, qui faisait l'éloge de son ami Ben Ali alors que des milliers d'opposants croupissaient dans ses cachots, a été obligé de faire recevoir la soeur de Ben Brik à l'Elysée. Une gifle au dictateur, qui lui a évité d'être lui-même mis en cause par l'opinion publique en France.
Le combat ne fait que commencer en Tunisie. Les démocrates, les syndicalistes, les militants de gauche, la jeunesse contestataire continuent d'être réprimés. Les militants du Raid peuvent être amenés devant le juge aussi rapidement qu'ils ont été relâchés. Nous ne baisserons pas la garde, et nous entendons bien poursuivre des actions de solidarité avec les luttes en Tunisie.

Ali Abdallah
Rouge 11 mai 2000