Au plus fort de la crise malgache (cf. p. 10) , la France a hébergé Rajoelina à son ambassade. Il a fallu trois jours, après les condamnations unanimes du coup d’Etat de l’Union africaine, de la SADC (groupement des pays d’Afrique australe), et de l’Union européenne, pour que la France qualifie la prise de pouvoir de « coup d’Etat ». Même si elle proclame son impartialité, cela n’a pas empêché son ambassadeur, nouvellement nommé, de faire « une visite de courtoisie » à Rajoelina avant sa cérémonie d’installation au pouvoir en lui assurant que la coopération économique serait maintenue. Soutien de taille quand on sait que la France est le premier bailleur du pays. Cela tranche avec les Etats-Unis et la Norvège qui ont suspendu leur aide économique. La France n’est visiblement pas chagrinée de ce coup d’Etat. L’a-t-elle encouragé ? En 2002, les autorités françaises avait tardé à reconnaître la chute de « leur » dictateur, Ratsiraka, et l’élection démocratique de Ravalomanana, imposé par la population au terme de plusieurs mois de mobilisation. En représailles, la France avait perdu des parts de marché et des investissements, au profit d’autres pays (USA, Canada, Afrique du Sud, Chine) et du groupe de Ravalomanana lui-même, même si certains groupes français comme Colas (construction de routes) avaient bien tiré leur épingle du jeu. Il avait fallu toute l’insistance de Sarkozy pour permettre à Total d’obtenir 60% de l’important gisement de pétrole lourd de Bemolanga, mais à des conditions qui n’étaient visiblement pas celles qu’espérait la multinationale. Par ailleurs, Rajoelina s’est appuyé sur le clan déchu de l’ex-dictateur Ratsiraka, exilé en France, notamment sur le neveu de ce dernier, et sur son ex-chef d’Etat-major. Autant d’éléments qui, s’ils ne permettent pas d’affirmer catégoriquement que la France a joué un rôle en sous-main, militent pour que des enquêtes complémentaires soient menées…